Ce centre a une mission,faisons-en notre cause!
16 March 2016
Nous nous réunissons ce soir pour porter un message fort et concret : le centre dédié au cœur de la femme (Woman Heart Health Center) désormais connu sous le nom de Yaduna, est une réalité qui commence à s’affirmer et à franchir le cap des années. Ce projet qui a germé dans le cœur et la tête d’un petit groupe a grandi, le rêve est devenu réalité, les défis ont été relevés. A l’origine une idée: le cœur n’est pas qu’une affaire d’hommes! Il y a aussi des statistiques : une femme sur trois meurt d’un problème cardiovasculaire alors qu’une femme sur 31 meurt d’un cancer du sein. C’est dire que les maladies cardiovasculaires constituent le vrai fléau des temps modernes. Il y a eu ensuite une équipe soudée, motivée par la volonté de la présidente Mme Wafaa Sleimane. Cette équipe a travaillé sans relâche, défini la mission et la vision du centre, élaboré les protocoles de soins, tracé le parcours de la femme depuis son arrivée au centre jusqu’à sa sortie munie de recommandations claires et éventuellement d’une prescription de traitement. Cette équipe a rassemblé depuis le début les représentants de deux universités prestigieuses, l’université Saint Joseph, et l’université américaine de Beyrouth, a conclu un accord entre ces universités et le centre Yaduna, conférant au centre un label de qualité scientifique. Grâce à la générosité des donateurs, le centre est devenu une réalité physique, accessible à toutes les femmes libanaises de tous les horizons socioéconomiques soucieuses de la santé de leur cœur et de leurs artères.
Mais ce n’était que le début. Le travail a continué avec le même rythme, inspiré du mouvement perpétuel d’une montre suisse ! Les cardiologues du centre, accompagnés des cadres paramédicaux, ont sillonné le Liban à la rencontre des femmes dans les villages, les banques, à travers les municipalités et diverses associations de la société civile, pour donner des conférences sur la prévention cardiovasculaire. Des campagnes publicitaires, des interviews télévisées, ont martelé le même message, sans compter l’activation des réseaux sociaux via internet. Ces campagnes d’information et de sensibilisation, s’adressant aux femmes dans un langage compréhensible, et selon un discours unifié, ont eu des retombées positives. En 2015, plus de 1000 femmes ont effectué une première visite au centre, et 1734 femmes ont été vues en visite de suivi.
Elles ont compris le message : contrairement aux idées reçues, les femmes peuvent accumuler avec le temps et en particulier après la ménopause les mêmes facteurs de risque cardiovasculaire que les hommes : obésité, diabète, hypertension artérielle, sédentarité, élévation du cholestérol et des triglycérides, sans compter le fléau du tabagisme actif et passif. A travers le monde, beaucoup de sociétés savantes de cardiologie, beaucoup d’associations de la société civile ont compris l’importance de cette réalité émergente et notre centre a été pionnier pour porter le flambeau de cette mission.
En revoyant le bilan d’une année, nous n’avons été que partiellement surpris par les chiffres : une accumulation impressionnante de facteurs de risque et d’athérosclérose silencieuse chez des femmes a priori saines. Ces femmes ont reçu les conseils d’hygiène de vie, et selon le cas, un traitement médical, et certaines ont même été référées pour une intervention sur les artères coronaires !
Des réunions d’évaluation du fonctionnement du centre, agrémentées d’une bonne dose de critique constructive, ont eu lieu. Ces réunions protègent sans doute ce centre des dérapages, et lui confèrent un label de qualité indiscutable, conformément à l’engagement des deux universités dans ce projet. Il est temps de passer à une nouvelle étape, celle de l’analyse de toutes les données accumulées et d’entreprendre des travaux de recherche épidémiologiques ou cliniques.
Forts de tous ces acquis, nous ne devons aucunement dormir sur nos lauriers. Le momentum accumulé doit continuer, car la prévention est un domaine fragile. Rien ne peut paraitre aussi agréable que le sentiment béat d’être en bonne santé apparente, et beaucoup de gens n’ont pas envie d’être secoués et rappelés à la dure réalité. Ce centre a une mission, faisons-en notre cause !
Antoine Sarkis
professeur en cardiologie-faculte de Medecine,USJ Cardiologue -Hotel Dieu de France
Membre du Board of trustees et du Board of directors -Yaduna